Mécanismes et mouvements psychiques durant la grossesse
La période pré-natale représente un moment tout à fait particulier dans la vie des futurs parents et vient bousculer un équilibre personnel et familial en principe déjà bien établi. D’un point de vu identitaire, d’autant plus s’il s’agit d’une première grossesse, un travail psychique va se mettre en place, afin d’une part, de développer et de s’approprier sa nouvelle place et son nouveau rôle de parent,, et d’autre part d’opérer une forme de « rencontre intime avec soi-même » (Bydlowski & Golse, 2001). L’ensemble du fonctionnement antérieur, notamment les investissements relationnels, les représentations internes et externes, ainsi que les mécanismes de défense vont être ébranlés. Les mécanismes d’adaptation et mouvements psychiques opérant durant cette période peuvent varier considérablement d'une personne à l'autre, cependant on observe fréquemment:
Transparence psychique et réactivation des conflits infantiles
Le plus souvent chez la mère, toute cette ébullition psychique va être sous-tendue par le phénomène de transparence psychique. Ce dernier est décrit par Bydlowski comme « un fonctionnement psychique maternel particulier, caractérisé par l’abaissement des résistances habituelles (...) face au refoulé inconscient, et marqué par un surinvestissement de son histoire personnelle et de ses conflits infantiles (...) » (Bydlowski & Golse, 2001). En d’autres termes, durant la grossesse on observerait une sorte de “perméabilité psychique” permettant un échange privilégié entre l’inconscient et le conscient. Ce chemin, plus souple, vers l’inconscient favoriserait ainsi la résurgence et l’accès aux traumatismes de l’enfance et plus largement de la vie au travers de rêves très vifs ou de souvenirs remontant brusquement à la conscience.
Il est donc relativement courant, durant cette période, que les futurs mères viennent à questionner leur histoire personnelle mais aussi familiale et notamment la relation à leur propre parents et les conflits l’ayant accompagné.
Redéfinition de l'identité
Les futurs parents doivent intégrer leur nouveau rôle à une identité jusqu’ici stable et établie. La grossesse est donc marquée par une transition, ou un ajout, d’une nouvelle dimension de soi. Cette réorganisation va elle aussi être aidée et sous-tendue par plusieurs questionnements et réflexions sur leur propre histoire. Ainsi les futurs parents vont venir s'interroger sur les parents qu’ils ont eu, ceux qu’ils auraient peut-être souhaité avoir, et ceux qu’ils souhaiteraient être. Tout cela passera alors par des interrogations sur leurs propres valeurs et sur le style éducatif qu’ils aimeraient adopter et transmettre à leur tour.
- Ambivalence des sentiments
La grossesse peut également être source d’une grande ambivalence. Les futurs parents sont susceptibles d’expérimenter simultanément différents sentiments parfois antagonistes comme la joie couplée à la peur, l'anxiété et les doutes mélangés à l’excitation de la rencontre avec leur bébé . Cette ambivalence est tout à fait normale et saine. Elle est liée aux importants changements que suscitent l'accueil d’un enfant et à la part d’inconnu et de nouveauté que cela implique. Il est important de pouvoir accepter celle-ci en en faisant part à son co-parent par exemple.
- Projections et fantasmes
La période pré-natale est également propice aux fantasme et aux projections quant à l’enfant à naître. La rêverie et les pensées liées aux caractéristiques que le futur parent va prêter à son bébé vont participer au processus d’appropriation de sa parentalité d’une part mais également venir tisser et matérialiser l’existence de plus en plus concrète de celui-ci. Ainsi les parents auront tendance à imaginer, lors des échographies par exemple, à qui leur bébé ressemblera le plus physiquement, à lui prêter un caractère et des habiletés aux travers de ses mouvements in-utero ou encore à souhaiter qu’il adopte certains traits de personnalité leur rappelant eux-même ou un proche.
Anxiété et peurs spécifiques
Durant la période pré-natale, il est également courant que les futurs parents fassent face à l’émergence de peurs et d’angoisses spécifiques, liées à la grossesse, à l'accouchement et à la santé du bébé. Ces dernières, bien que normales, peuvent dans certains cas s’avérer envahissantes voire handicapantes au quotidien. Il est alors primordial de pouvoir les repérer et les accompagner pour soutenir au mieux le processus d’accès à la parentalité.
La manière dont les futurs parents font face aux mouvements psychiques qui les traversent, et notamment aux peurs et aux angoisses, va en grande partie dépendre de leurs ressources psychiques personnelles et du soutien social dont ils disposent. Un réseau de soutien solide (partenaire, famille, amis, professionnels de santé…) peut aider à atténuer l'anxiété et à renforcer la résilience.
Rédigé par Pauline FEDY, Ostéopathe chez Yada.